Le massif des Monts Dore se réchauffe
Dans le massif des Monts Dore, la Réserve naturelle nationale de Chastreix-Sancy a commandé une étude sur la caractérisation et l’évolution du climat local.
Partout sur la planète Terre, le changement climatique est en marche. Et dans le massif des Monts Dore, aussi ? "Nous voulions intégrer cette notion dans le plan de gestion de la réserve, mais localement nous ne disposions d’aucune donnée permettant de caractériser finement le climat ni d’analyser son évolution sur un temps assez long", explique Thierry Leroy, conservateur de la Réserve naturelle de Chastreix-Sancy. "Nous avons donc décidé de faire appel à un climatologue."
Réalisée par Frédéric Serre en hiver 2014-2015, l’étude des données collectées à partir des stations Météo France et leur analyse a été restituée aux responsables de la réserve. Principales conclusions : en soixante ans, la température moyenne de la zone a augmenté de 0,91 °C. L’enneigement est devenu précaire notamment en début et en fin d’hiver ; les épisodes de pluie ont gagné en intensité. Le nombre moyen de jours de gel a baissé de 124 à 113 par an.
«Ces résultats vont nous permettre de définir une stratégie de suivi d’espèces et de milieux naturels dont l’évolution dépend essentiellement des conditions climatiques comme, par exemple, la végétation de l’étage subalpin, poursuit Thierry Leroy. Nous allons aussi continuer la collecte de données météorologiques, notamment à partir d’une station d’altitude.» Une initiative qui pourrait donner l’exemple, alors que se tenait en France, à Paris, la fameuse COP 21. «C’est une des rares études réalisées en local, souligne le responsable de la réserve. Sachant qu’il s’agit d’un petit massif isolé géographiquement, cela me semble pertinent pour suivre le réchauffement climatique et ses conséquences.»
3 questions à Frédéric Serre, géographe, auteur de l’étude de climatologie Comment fait-on pour analyser le climat d’un petit territoire ? En climatologie, on s'appuie essentiellement sur les mesures au sol. Or, en montagne et en zone peu peuplée comme ici, le maillage des postes de Météo France est lâche et il peut être intéressant de le compléter, ce que nous avons fait avec l’association Infoclimat en installant un poste à plus de 1 600 m d’altitude au pied du Puy de Sancy. L’autre difficulté concerne la durée des séries de mesure : on considère qu'il faut des séries sur trente ans pour qu’elles soient représentatives du climat moyen. Que montre votre étude ? Elle confirme les grandes tendances qui s’observent à l’échelle globale : hausse des températures, baisse de l’enneigement,... Ces données révèlent aussi de fortes disparités liées à l’altitude, à la topographie, ce qui se traduit par une grande diversité de milieux et d’habitats naturels dans un territoire finalement peu étendu. Elles montrent enfin les liens qui existent entre les aléas climatiques et les risques naturels comme les avalanches, les coulées de boue… Quel est son intérêt ? Une meilleure connaissance des paramètres climatiques locaux soulève des questions importantes pour les gestionnaires d’espace, les développeurs, les élus, les professionnels… avec des enjeux économiques forts, mais aussi environnementaux. Ainsi, la question du devenir des sports d’hiver dans des secteurs de montagne dont l'économie dépend essentiellement du tourisme soulève des inquiétudes, alors que les chiffres confirment une baisse tendancielle de l’enneigement.